Tant de choses encore que tu ne m'as pas léguées.
Tant de préciosités à subtiliser. À s'approprier.
Les pensées décollent vers la masure de l'autre, du frangin fraîchement décimé. La branche pourrie des Mayfair n'est plus. C'est une bonne chose.
Le sourire creuse sa douce folie en travers du visage plongé dans l'ombre.
Mais, il y a que.
La démone, l'enfant pâle a mis main basse sur ses biens. Tout ça lui revient, songe-t-il, pupilles fixées sur le bâtiment qui se profile à l'horizon. Pénible constatation. Il va falloir les récupérer.
La lune exagère les dimensions, gome les transitions. Le paysage plat s'étale sous ses yeux, la porte se découpe au couteau sur la façade de la baraque.
Livide, la main s'avance et dans un murmure, efface cette maigre barrière à l'avidité qui le dévore.
Il connaît chaque sort de protection dont son frère a entouré sa maison. Futile, en passant.
L'homme s'insurge et se gratifie de multiples compliments dans le secret de sa démence, se targue d'avoir toujours été meilleur que l'autre.
L'autre. L'autre dont le visage fuit sa mémoire. Ressemblais-tu à père, à moi. À tes enfants.
Quand ai-je bien pu te voir pour la dernière fois.
La famille est pure perte.
La famille.
Hait. Est.
Point barre.
Un court instant la violence d'un regret vient heurter ses sentiments. Vite relégué à l'arrière plan. Darwin, jamais, ne s'autorise le moindre doute, la moindre hésitation.
La moindre nuance dans son jugement.
Frères ils étaient mais, ennemis tout autant.
Dans l'obscurité qui l'accueille, il croit décerner la silhouette d'une femme. Personne en réalité. De simples fantômes qui l'observent depuis l'au delà, certainement mécontents de le voir là. Prêts à bondir des enfers pour l'anéantir, au cas ou il poserait un doigt sur leur héritage.
Il a cru sentir leur colère glisser sur lui, la fois dernière. Ce n'était rien qu'une impression, pense-t-il, la toute humaine culpabilité venue se manifester à lui lorsque la collection de bijoux de madame a  malencontreusement glissé dans sa poche.
Rien de grave, en définitive.
Les ombres le poursuivent jusqu'à l'escalier, celui-là même, descendant vers les enfers du savoir Mayfair. Bon nombre d'ouvrages jamais parvenus jusqu'à son regard, jamais exploités.
Tristesse, une terrible perte. Le voilà venir conquérir ces denrées cachées, bouquins qui, il en est sûr, seront capables de le délivrer.
L'obsession le dévore. Occupe chaque seconde de sa fade existence.
Susurrement glacé, en résulte une bille de lumière froide, glaçante. Puissance aux yeux du monde dissimulée, pleinement utilisée loin des regards horrifiés. La puissance n'est réelle et effective que lorsqu'elle se cache. Lorsqu'elle œuvre dans l'ombre.
Les volumes sont comme aplatis. Zappés. Les volées de marche, torrent de pierre dégueulant l'intru jusqu'à la cave, percutent à la fin de la descente cette arche de pierre ancestrale. On dirait ces caves venues d'un autre monde.
Et sous la froide lueur qu'il mène d'un mouvement de la main, les bibliothèques se dessinent enfin, dévoilées à son regard. Tant de pages, à lire, à dévorer.
-Vous voilà enfin, susurre le fou en les caressant du regard amoureux d'un maniaque avide de les embrasser de sa connaissance.
Tout ébahi par ce qui se profile à l'avenir, inconscient de la traîtresse présence qui le poursuit depuis son entrée dans les entrailles de l'enfer sur terre.
Hell.